Picture of Service Communication

Service Communication

Œcuménisme : Rencontre avec un chercheur d’Unité, Philippe Dautais

Cela fait quarante ans que Philippe Dautais et son épouse Elianthe se sont installés à Monestier pour y développer le Centre d’études et de prière Sainte Croix. Prêtre orthodoxe , le père Philippe anime également la paroisse Saint Nectaire et Sainte Foy rattachée au métropolite de Roumanie Joseph Pop.

A l’occasion de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, j’ai voulu rencontrer celui qui est engagé depuis longtemps dans le dialogue œcuménique et interreligieux.

Il m’a reçu chaleureusement et amicalement en souvenir d’une époque pionnière où nous avons partagé un temps, les moments fondateurs qui ont conduit à la création du Centre Sainte Croix.

Confortablement installés devant un feu de cheminée nous engageons un échange que ce fervent chercheur d’unité alimente en puisant dans sa culture théologique et historique. Il rappelle la prière de Jésus dans l’évangile de Jean ch 17, « Qu’ils soient Un afin que le monde croie que tu m’as envoyé », le Christ me dit il est venu pour abolir les frontières et or tout au long de son histoire le christianisme a connu trois grandes ruptures, la première avec les chaldéens, les coptes et les arméniens au Ve siècle en raison d’un désaccord  sur la question des natures humaine et divine du Christ, puis ce fut le grand schisme entre l’église de Rome et l’église d’Orient dont la tradition fait remonter l’origine à 1054 date à laquelle le cardinal Humbert de Moyenmoutier dépose une bulle d’excommunication à l’encontre du  patriarche Michel Cérulaire et de l’Eglise de Constantinople. Enfin advient la terrible fracture entre les catholiques et les protestants qui jettent l’Europe dans des guerres fratricides tout au long de la seconde moitié du 16e siècle. 

 « Ces moments historiques », me dit-il , « à partir desquels se sont cristallisées des positions théologiques et des postures politiques ont produit des confessions séparées, chacun s’est autonomisé et a développé des organisations et des fonctionnements spécifiques. C’est pourquoi le chemin vers l’unité nous impose de surmonter l’histoire »

Ce travail, cette quête n’a vraiment commencé qu’après la seconde guerre mondiale, alors même que le monde avait besoin de réconciliation. 

« Entre 1950 et le début des années 80 il y a eu un dialogue qui a permis de véritables avancées, elles ont été marquées par un désir partagé d’atteindre l’unité ».

Nous nous remémorons ensemble la rencontre entre le Pape Paul VI et le Patriarche Athénagoras en Janvier 1964 qui déboucha sur la levée des anathèmes et une déclaration commune exprimant tout d’abord leur décision d’enlever de la mémoire de l’église les fameuse excommunication de 1054. Dans ce geste de justice et de pardon réciproque ils sont conscients que tous les différents ne seront pas aplanis mais « ils pourront être surmontés par l’action du Saint Esprit, grâce à la purification des cœurs… afin d’être à nouveau « Un » comme le Seigneur Jésus Christ l’a demandé pour eux à son père ».

Jamais les deux Églises n’ont été aussi près de l’unité.

De ces moments forts, reconnaît père Philippe « il demeure un œcuménisme de l’amitié mais la soif d’unité s’est refroidie. Depuis le milieu des années 80 on a vu apparaître des rétractations, des crispations identitaires, le vieux fond de nationalisme orthodoxe  s’est trouvé revivifié par des alliances politiques ».

A ce moment de notre conversation je ne peux m’empêcher de faire référence à la visite de Jean Paul II à Kiev en juillet 2001, elle n’avait pas particulièrement été appréciée par le patriarcat de Moscou. Le pape y prononça cette phrase prémonitoire : « Merci à toi Ukraine qui as défendu l’Europe dans ta lutte inlassable et héroïque contre les envahisseurs ».

Pour le Père Philippe chaque Eglise doit cheminer vers sa propre unité, personne n’étant au clair dans sa propre institution. Il cite le frère Alois, prieur de Taizé pour lequel se poursuit une dynamique de l’unité qui passe par la prière commune, la semaine de prière pour l’unité instaurée chaque année au mois de janvier, une vie communautaire de réconciliation. Ce à quoi le père Philippe rajoute : « Aujourd’hui les crispations nationalistes sont exacerbées mais par delà les postures de pouvoir, cette dynamique de l’unité ne peut s’éteindre, elle réside dans notre démarche intime d’ajustement au Christ » .

« L’œcuménisme est un chemin de conversion au Christ » me dit- il pour  conclure avec un grand sourire.

Martine Noverraz,
article publié dans Église en Périgord de Janvier 2023

Partager cet article