Cathédrale Saint-Front de Périgueux, le mardi 15 avril 2025
Frères et sœurs, chers amis,
Le mercredi des cendres, nous étions surpris du nombre de personnes venues participer à cette liturgie, nous l’avons été aussi pour la belle et poignante liturgie des Rameaux, qui nous a fait entrer dans la grande semaine, celle où nous accompagnons notre Seigneur Jésus dans le combat de sa Passion, jusqu’au matin de sa Résurrection, où nous accompagnons les pas des nombreux catéchumènes adultes dans les multiples combats de leurs vies, jusqu’à leur baptême dans la nuit de Pâques.
Comment ne pas rendre grâce à Dieu pour ces hommes et ces femmes, de toutes générations, de plus en plus nombreux, qui découvrent ou redécouvrent le Christ, guidés par l’Esprit, et qui frappent à la porte de l’Église pour être plongés dans la foi de ce peuple et devenir des membres actifs de nos communautés ? Beaucoup arrivent ou sont arrivés par des chemins que nous n’avions pas balisés. Mais l’Esprit, qui est allé vous chercher sans nous, nous invite à marcher avec vous, avec eux, sur le chemin qui nous conduit au Christ, en témoins et en compagnons pour discerner l’œuvre de l’Esprit dans l’Eglise. L’attitude de cet accueil exige de nous une conversion, car à travers vous, à travers eux, le Christ, qui les attire, nous attire nous aussi une nouvelle fois, lui que nous n’aurons jamais fini de découvrir ni d’aimer !
Comme tous les ans à ce rendez-vous, nous venons d’entendre ce récit sur Jésus à la synagogue de Nazareth. Les auditeurs, d’abord, s’étonnent « du message de grâce qui sort de sa bouche ». Mais leur attitude, nous le savons, va vite changer et cette rencontre qui a commencé dans la joie va se terminer par un rejet. Cela n’est pas sans nous rappeler la liturgie des rameaux de dimanche : une foule enthousiaste qui accueille Jésus à Jérusalem et se retourne ensuite contre lui. Nous avons entendu le rejet, la condamnation du Christ qui le conduira jusqu’à la croix. Crucifié.
C’est pourtant là que tout commence pour nous, face à Jésus crucifié parce que c’est là que tout s’accomplit. Tout particulièrement dans le geste d’abandon confiant du Fils entre les mains de son Père « Père, je remets mon esprit entre tes mains ». Dans cette confiance Dieu nous a montré, nous montre le seul chemin du salut. Ensemble, le Père et le Fils tenant toujours leur promesse envers nous et l’humanité, au jour de Pentecôte, enverront leur Esprit sur la jeune Église, fragile dans son berceau. Dans cette pauvreté et cette fragilité de l’Eglise, L’Esprit devient sa force qui lui permet de naître et de renaître sans cesse, de devenir un lieu de confiance pour tous. À l’origine de la mission du Christ, comme nous l’avons entendu de la bouche de Jésus dans la synagogue de Nazareth, il y a l’onction du Saint Esprit : « l’Esprit du Seigneur m’a consacré ». À l’origine de la mission de l’Église, il y a l’Esprit du Ressuscité qui, le jour de Pentecôte, descend et consacre les apôtres : « Vous allez recevoir une puissance, celle de l’Esprit Saint, qui viendra sur vous, et alors vous serez mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8).
L’Esprit du Seigneur est sur moi. Chacun de nous peut le dire ; ce n’est pas prétentieux que de dire cela. C’est la réalité. Tout chrétien, peut faire siennes les paroles suivantes : « Le Seigneur m’a consacré par l’onction ». Et d’une manière particulière pour les ministres ordonnés. Chers frères prêtres et diacres, notre ministère, vous le savez bien, est tout entier ordonné au service de la dignité du peuple de Dieu. Et la dignité d’un peuple, même le plus pauvre, le plus petit, provient de la proximité de Dieu. Dieu, en son Fils, s’est approché de son peuple et, par son Esprit, de tous les peuples de la terre. C’est la raison pour laquelle il nous faut situer notre ministère dans ce grand souffle spirituel de la catholicité de l’Église, qui tend à s’exprimer tout simplement, à travers nos pauvres vies de prêtres, de diacres, de baptisés, par la façon dont nous nous mettons au service de la proximité de Dieu avec tout son peuple.Serviteurs, tous nous le sommes. Le serviteur n’est pas au-dessus de son maître : puisque le Christ a été persécuté, nous aussi, nous connaitrons la persécution d’une manière ou d’une autre. Mais n’ayons pas peur et regardons devant. Car la joie d’être avec lui, la joie d’être libérée par sa vérité, la joie d’être plongée, imprégnée, trempée dans l’huile parfumée de sa miséricorde, cette joie-là, personne ne pourra nous la ravir. Alors, quoi qu’il arrive, laissons-nous envoyés en mission, même si ça bouscule nos habitudes inévitablement, gardons confiance en la promesse du Père, comme le Fils l’a fait sur la croix, et consentons à devenir sur cette terre du Périgord, signe de son salut et de son Royaume ! Amen !
+ Philippe Mousset,
évêque de Périgueux et Sarlat