Service Communication

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Vœux De Mgr Mousset pour l’année 2019

Présentation des vœux de Mgr Mousset, le vendredi 25 janvier 2019, salle du Lux à Périgueux.

Le début de la nouvelle année nous offre la possibilité de nous arrêter, l’espace d’un instant, dans la succession des activités quotidiennes, pour vivre un temps de gratuité et de convivialité. C’est l’occasion pour moi de vous proposer quelques réflexions sur des évènements du passé et du présent, ainsi que sur les défis qui nous attendent dans le proche avenir.

Je suis donc heureux de vous accueillir avec les membres du Conseil épiscopal et je tiens à vous remercier d’être présents. Ce soir, nous venons d’horizons différents, dans la diversité de nos convictions et de nos croyances, mais nous sommes rassemblés par un même souci, celui du bien des autres et du bien commun, ce que nous manifestons à travers les vœux que nous échangeons en cette période.

Merci à vous Mr le Secrétaire Général de la préfecture, représentant M. le Préfet, Mr le maire de Périgueux, de Boulazac, de Trélissac, etc… Merci à vous tous, les élus… Merci aux autorités militaires et judiciaires, de la sécurité, aux membres des diverses associations de notre département, en particulier de celles qui œuvrent dans le domaine caritatif et qui s’emploient à aider, à soutenir et à accompagner toutes les personnes diversement éprouvées. Merci aux membres d’autres confessions chrétiennes… aux membres d’autres religions, d’autres spiritualités.

Merci enfin à vous, mes frères et amis prêtres et diacres, religieuses, religieux, laïcs engagés et membres de notre Eglise…

A l’occasion de cette nouvelle année, je désire offrir des vœux de paix à chaque famille, à chaque communauté, dans sa particularité et dans son histoire, à chaque personne, sans distinction ni discrimination. Formuler aussi des vœux de paix pour notre ‘‘maison commune’’, la planète, confiée à notre responsabilité, pour qu’ensemble, nous ayons à cœur d’en prendre soin, afin de permettre à chacun et à tous d’y trouver sa place pour y vivre, sans jamais oublier les générations futures.

Oui, je désire offrir des vœux de paix, sans ignorer les évènements sociaux et les manifestations qui, depuis plusieurs semaines, secouent notre pays, mais en souhaitant que cette nouvelle année permette à tous, et à tous les niveaux, d’entrer en dialogue afin de trouver les moyens de construire une société toujours plus juste et plus fraternelle. Dans ce travail d’écoute réciproque et de dialogue, il y va de notre capacité collective à bâtir l’avenir et à témoigner aussi que la violence ne peut pas devenir le mode d’expression habituel d’une société démocratique. Comme nous, évêques de France, nous l’écrivions il y a deux ans, en 2017, « il faudrait être sourds ou aveugles pour ne pas nous rendre compte de la lassitude, des frustrations, parfois des peurs et même de la colère, […] qui habitent une part importante des habitants de notre pays, et qui expriment ainsi des attentes et de profonds désirs de changements. Il faudrait être indifférents et insensibles pour ne pas être touchés par les situations de précarité et d’exclusion que vivent beaucoup sur le territoire national » (Dans un monde qui bouge, retrouver le sens du politique, p.12).

Dans ce moment particulier pour notre pays, le chrétien que je suis, n’oublie pas qu’il est également un citoyen. Un citoyen qui, avec beaucoup d’autres, éprouve une profonde gratitude pour celles et ceux qui sont engagés au service de la politique au plan local, régional, national ou mondial. Comme le Pape François l’a écrit dans son récent Message pour la 52ème Journée Mondiale de la Paix, « La fonction et la responsabilité politique constituent un défi permanent pour tous ceux qui reçoivent le mandat de servir leur pays, de protéger les habitants et de travailler pour asseoir les conditions d’un avenir digne et juste. Accomplie dans le respect fondamental de la vie, de la liberté et de la dignité des personnes, la politique peut devenir vraiment une forme éminente de charité » (1er janvier 2019).

Le moment que nous vivons, chers amis, est sans doute nécessaire pour que nous prenions le temps de nous asseoir et de nous redire, dans le respect de nos différences, grâce aux espaces d‘échanges et de paroles qui se mettent en place, ce qui est important pour vivre ensemble, en société. Sans nier le principe de réalité et la nécessité d’une certaine efficacité, force est de constater que notre société est devenue un peu trop utilitariste, subordonnée au diktat des marchés financiers, ainsi qu’aux indices de tous ordres ! Et, dans un tel contexte, la personne semble passer par pertes et profits et perdre ainsi le sens profond de son existence, de sa dimension sociale, de son humanité tout simplement. Je l’ai entendu ici et là, dans les messages de vœux, et je veux me faire ici l’écho de cette invitation à bâtir des ponts et des passerelles plus évidents entre l’économique, le social, le culturel, plutôt que de s’acharner à construire des murs !

Il y a sans aucun doute une urgence de la fraternité. Il est nécessaire de la développer, pour qu’elle ne reste pas qu’un simple mot dans une devise. Car, à bien y regarder, la fraternité nous oblige tous : elle nous rappelle que le respect de l’égale dignité de toute personne et la recherche du bien commun sont la seule voie possible pour contribuer à l’édification d’une société plus juste. Il est donc urgent de nous donner les moyens de nous écouter les uns les autres et de promouvoir un dialogue franc et constructif.

A ce stade, et dans cette perspective d’écoute et de dialogue, je voudrais évoquer un sujet douloureux pour moi, comme pour beaucoup de catholiques : c’est le drame et le scandale de la pédophilie dans l’Eglise. Je tiens d’abord à rendre un hommage appuyé aux victimes que nous n’avons pas su, ou parfois pas voulu, entendre. Il est heureux aujourd’hui qu’elles puissent parler et plus encore qu’elles soient enfin écoutées. Malgré tous les ratés, l’Eglise en France, à l’écoute de ce que ces personnes ont subi d’inhumain dans leur enfance, a pris des décisions et a fait appel à un certain nombre d’experts, pour accompagner les victimes dans leur difficile et douloureux travail de reconstruction, et plus encore pour faire en sorte que de tels actes ne puissent plus jamais se reproduire ! Je suis convaincu que le sommet convoqué par le Pape François à ce sujet, au mois de février prochain, portera des fruits de conversion et de vérité pour toute l’Eglise catholique et des fruits de justice et de paix pour les victimes.

Profondément blessé que des membres de l’Eglise aient pu se rendre coupables de tels actes qui ne seront jamais prescrits pour celles et ceux qui en ont été victimes, conscient que le travail de purification qui a été engagé demande à être poursuivi, je voudrais aussi que nous n’oublions pas, ce soir, l’humble fidélité au quotidien et à l’Evangile de la grande majorité des ministres ordonnés (prêtres et diacres), des personnes consacrées et des catholiques engagés.

Permettez-moi de revenir rapidement sur deux évènements qui ont marqué l’année achevée. Le premier concerne le dialogue interreligieux avec la rencontre organisée ici-même, en avril dernier, à l’initiative de l’Eglise catholique et de l’Association musulmane de Périgueux. Les intervenants, le Recteur de la Mosquée de Bordeaux, M. Tarek Obrou, et l’évêque auxiliaire de Marseille, Mgr Jean-Marc Aveline, ont permis aux nombreux participants d’interroger nos identités et de prendre à nouveau conscience qu’une identité se forge dans l’ouverture à l’altérité, dans la relation aux autres différents de soi. C’est pour cette raison que l’avenir réside dans la coexistence respectueuse des diversités, et non pas dans l’établissement d’une pensée unique.

De telles rencontres contribuent, à n’en pas douter, à vaincre nos peurs des autres et à choisir, malgré les inévitables difficultés du dialogue, de nous positionner comme des constructeurs de ponts, que nous soyons croyants en Dieu ou non-croyants !

Le deuxième évènement concerne la rencontre organisée, dans cette salle, à l’initiative d’un collectif associatif, sur le thème des talents venus d’ailleurs. Nous savons que le phénomène migratoire est complexe et qu’il pose des questions sociales, économiques, politiques et culturelles, aux communautés nationales et à la communauté internationale. C’est dire que cette rencontre a permis de porter un regard différent sur les migrants présents en Périgord. Il s’agissait, en effet, d’apprendre à les regarder, non pas d’abord comme un problème, mais comme des personnes avec leurs talents, capables de nous enrichir de leurs différences et d’apporter leur contribution à la vie de notre société et de notre pays.

Que l’ampleur du phénomène migratoire puisse nous interroger et susciter des peurs n’est pas en soi anormal ! Le péché, si vous permettez l’expression, serait de laisser ces peurs déterminer nos réponses, conditionner nos choix, compromettre le respect et la générosité, alimenter la violence ou la haine. C’est pourquoi, en offrant des vœux de paix, je souhaite que les bouleversements que nous vivons nous aident à vouloir une société plus humaine où l’accueil et le respect de toute personne soient au centre de nos préoccupations et de notre attention.

Je voudrais aussi évoquer les États généraux de la bioéthique qui ont été organisés au cours de l’année 2018. Ils ont contribué indéniablement à nous interroger sur la société que nous voulons pour demain, en nous invitant aussi, dans la diversité de nos convictions et de nos croyances, à prendre la mesure de l’inestimable grandeur de l’être humain, de sa conception jusqu’à sa fin de vie. Car, si nous pouvons nous réjouir de l’évolution nécessaire et heureuse des sciences, comment ne pas être conscients du risque de réduire les personnes, en particulier les plus vulnérables, à n’être que des objets d’investigation et d’expérimentation ?

Il y a là, me semble-t-il, un vrai défi pour le présent et pour l’avenir. Nous savons bien, au plus profond de nous, que l’humain ne peut pas être considéré comme un bien de consommation, utilisable ou jetable au gré des besoins. La dignité inaliénable de tout être humain nous oblige toujours au respect et nous conduit aussi à favoriser l’accueil et l’accompagnement des plus vulnérables. Sans quoi, nous courons le danger de donner prise à ce qu’il y a d’inhumain en chacun de nous ! Aussi, je souhaite que la démarche engagée avec les États généraux de la bioéthique nous aide à promouvoir un nouvel humanisme, qui ait toujours à cœur de placer au centre de notre attention, de nos recherches, de nos préoccupations, la personne dans toutes ses dimensions, et en particulier les personnes les plus vulnérables, de l’enfant à naître jusqu’à la personne en fin de vie, en passant par les personnes handicapées, marginalisées ! Et je souhaite que, sur ces questions qui nous concernent tous, les chrétiens de toutes les confessions puissent apporter leur contribution et témoigner que la défense d’un certain nombre de valeurs est toujours au service de la grandeur de l’homme et de la femme, dont nous croyons qu’ils ont été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu.

Je voudrais maintenant m’adresser aux membres des communautés catholiques présentes en Périgord. Comme pasteur du diocèse de Périgueux et Sarlat, je tiens à leur exprimer ma profonde reconnaissance pour l’immense générosité déployée au service de la vie et de la mission de l’Eglise, tant dans les communautés paroissiales que dans les Services et les mouvements. Je me réjouis notamment du rassemblement des lycéens de la région Nouvelle Aquitaine, organisé à Bergerac à la Toussaint. Je veux mentionner le travail accompli au sein de l’Enseignement Catholique dont je salue le nouveau directeur diocésain, Monsieur Thierry Castillo. Je pense aussi aux adultes qui se préparent à recevoir le Baptême et qui sont au nombre de 34. Je n’oublie pas les personnes engagées au Secours Catholique, au CCFD et dans bien d’autres associations caritatives et qui manifestent visiblement le souci de l’Église pour les petits et les pauvres. Oui, notre Eglise diocésaine est bien vivante, malgré l’expérience de sa pauvreté. Et si elle vit, c’est bien grâce à l’engagement, à la générosité, à la bonne volonté de chacun de ses membres, prêtres et diacres, religieux et religieuses, personnes consacrées, fidèles laïcs.

Les projets ne manquent pas pour les uns et les autres. Cependant, il en est un qui concerne l’ensemble de l’Église diocésaine : c’est celui qui va nous engager dans, ce que nous appelons dans notre jargon, une démarche missionnaire synodale (ce qui veut dire marcher ensemble, dans l’écoute mutuelle…) de Pâques 2019 à Pentecôte 2021, date du bicentenaire de la création du diocèse de Périgueux et Sarlat dans sa configuration actuelle. Je souhaite que cette démarche atteste non seulement de la vitalité de l’Église en Périgord, malgré toutes ses pauvretés, mais lui permette surtout d’ouvrir des chemins nouveaux pour annoncer l’Évangile ici, en Périgord.

Je voudrais terminer en évoquant, brièvement, l’échéance prochaine des élections européennes. Rassurez-vous, il ne s’agit pas de donner de quelconques consignes de vote ! Je veux simplement souligner ce que nous savons déjà et ce que nous pourrions parfois oublier : l’Europe s’est construite grâce à une poignée d’hommes réalistes et visionnaires. Ils y ont cru et se sont battus pour cela, dans le contexte de l’après deuxième guerre mondiale. Aujourd’hui, ce projet semble s’être perdu aux yeux de beaucoup. L’Europe serait devenue trop technocratique, au point même qu’elle serait responsable de tous les maux qui nous accablent. Ce constat a poussé notre cellule pastorale rurale à réfléchir à une initiative : dans le cadre de la Mission Rurale, en coordination avec la Mission Ouvrière, une conférence-débat sera organisée au Lux, le 8 février. Pourquoi cette soirée ? Parce que, à l’approche des élections européennes, il a semblé important de contribuer à éclairer les consciences sur les enjeux de la construction européenne et ses conséquences sur notre quotidien, tant dans le domaine rural qu’économique ou sociétal. Nous aurons la chance d’accueillir et d’entendre un grand spécialiste de ces questions en la personne de M. Jean-Baptiste Laignelot, périgourdin d’origine et de cœur, et actuellement Directeur du Service juridique à la Direction des questions institutionnelles, au Conseil de l’Union Européenne. Cette soirée promet donc d’être particulièrement intéressante pour tous et je vous invite avec beaucoup de joie !

Voilà, j’en ai fini ! Encore une fois, permettez-moi de vous souhaiter une bonne et heureuse année pour vous-mêmes, vos familles et vos amis et de vous offrir à tous des vœux de paix ! Merci de votre attention.

+ Philippe MOUSSET,
Evêque de Périgueux et Sarlat

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