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Dieu dans la Pub ? Une démarche missionnaire !

Le 25 novembre dernier, le Père Gautier Mornas publiait "Dieu dans la Pub" aux éditions du Cerf. Un titre que portait déjà l'exposition "culte" qui a vu le jour dans le cloître de la cathédrale Saint-Front de Périgueux à l'été 2013, avant de devenir une émission sur la chaîne KTO. Gautier Mornas revient pour nous sur ce qu'il qualifie de succès insolite et inattendu.

Le 25 novembre dernier, le Père Gautier Mornas publiait « Dieu dans la Pub » aux éditions du Cerf. Un titre que portait déjà l’exposition « culte » qui a vu le jour dans le cloître de la cathédrale Saint-Front de Périgueux à l’été 2013, avant de devenir une émission sur la chaîne KTO. Gautier Mornas revient pour nous sur ce qu’il qualifie de succès insolite et inattendu.

Quelle est la genèse du projet « Dieu dans la Pub » ?

Gautier Mornas : « Dieu dans la Pub », c’est une aventure à laquelle je ne m’attendais absolument pas. Elle a débuté à l’été 2013 dans le cloître de la cathédrale Saint-Front de Périgueux, mais la véritable genèse remonte à bien plus longtemps.

Plus précisément, à l’époque où j’étais étudiant à l’Institut Catholique de Paris, je suivais alors un cours d’iconographie chrétienne, avec un pasteur protestant. À la fin du semestre, pour valider mon cours, j’ai proposé à celui-ci une dissertation non sur un énième tableau de la renaissance que tout le monde avait déjà commenté vingt fois, mais sur une publicité pour Europe 1, publiée à l’époque dans le métro parisien. C’était une publicité mettant en scène la vierge Marie dans un cadre totalement insolite. Pour moi cela restait de l’iconographie chrétienne.

Ça a été le point de départ de mon intérêt pour l’utilisation de l’image de Dieu dans la publicité. Ce professeur m’a invité et incité à approfondir le sujet. Ce prof s’appelle Jérôme Cottin et je le cite dans ma préface.

Cette histoire est restée un peu dans mon esprit comme une question à soulever un jour. C’est en arrivant à Périgueux, et en rencontrant Damien Tardy qui était à l’époque directeur marketing chez Fromarsac que l’idée m’est revenue, avec lui et Karin de Segonzac, une paroissienne de Sorges, de retravailler cette question.

C’est ainsi qu’à l’été 2013 nous avons proposé dans le cloître de la cathédrale Saint-Front une exposition d’une quarantaine de panneaux reprenant cette thématique de l’utilisation de l’image religieuse dans la publicité contemporaine. À notre grand étonnement, l’exposition a bien marché, on a eu plus de 20 000 visiteurs sur 4 mois.

La première grosse surprise a été de voir que parmi les visiteurs, touristes, pèlerins, ou juste des curieux, il y avait des personnes intéressées pour recevoir cette exposition chez elles.

Nous nous sommes alors dit qu’il fallait retravailler l’exposition dans une démarche plus appliquée, et plus esthétique. Ce qu’on a fait afin qu’elle soit présentée 6 mois après dans un espace culturel à côté de Nancy et surtout dans la grande nef de la cathédrale de Metz où, véritablement, l’exposition a décollé.

Elle nous a ensuite un peu échappé dans le sens où une galerie parisienne l’a accueillie pendant un mois. Avec Paris, on a eu un véritable déclic : d’une exposition simplement composée de 40 visuels, nous sommes passés à une exposition audiovisuelle grâce à un partenariat avec Culture Pub, une ancienne émission de la chaîne M6, aujourd’hui sur Internet. Ils nous ont façonné une petite émission de 10 minutes qu’on diffusait dans le cadre de l’exposition.

À ceci s’est rajouté un troisième élément, tactile, car on représentait sous vitrine tout un tas d’objets promotionnels, avec une « panier-type » de la ménagère qui pouvait faire ses courses selon le concept « Dieu dans la Pub » avec un caddie ou un panier qui débordait de galettes Saint-Michel, d’eau Saint-Yorre, etc.

À Paris nous avons dépassé les 100 000 visiteurs cumulés, et l’exposition telle qu’on la connaît aujourd’hui a connu un essort assez incroyable, puisque de Paris, elle est ensuite partie à Rouen, au Vezinet, à Libourne puis à Agen… Par la suite, elle a connu un nouveau pic de fréquentation cet été à Nice, en la cathédrale Ste-Réparate avec, à nouveau, plus de 100 000 visiteurs.

L’aventure ne s’arrête pas là puisque elle sera présentée à la galerie du Parvis à St Nazaire en janvier-février, ensuite à Caen, en mars-avril et à Granville du 15 juin au 15 août, avant une nouvelle tournée à la rentrée 2017.

La deuxième belle surprise avec ce projet c’est la rencontre, l’année dernière, avec Gilles Cozanet, créateur de Stade 2, qui a pris sa retraite en Périgord, et qui, s’ennuyant un peu, a monté une boîte de production avec son fils Mathieu. Il m’a proposé de retravailler encore le concept sous le format d’une petite émission, qu’on appelle une virgule ou une pastille, de 3 minutes. Nous avons réalisé 3 pilotes qui ont plu à la chaîne KTO, qui a commandé 40 épisodes qui sont diffusés depuis le 15 septembre, tous les dimanche soir à 20h35.

18 épisodes ont déjà été écrits et tournés, et j’en tourne 10 tous les deux mois, pour aller jusqu’au 15 juin.

Comment se déroule la réalisation d’un épisode ?

G. M. : L’écriture et le façonnage se font en Dordogne, mais le tournage se fait directement dans les studios de KTO à Malakoff, en banlieue parisienne.

Parlez-nous de votre livre.

Là encore, c’est grâce à un contact un peu fortuit avec les éditions du Cerf, qui se sont montrées intéressées par l’exposition et les émissions. Nous avons abouti à la publication de ce livre, qui est, selon moi, un complément assez intéressant à l’exposition que je vois comme une présentation succinte de la culture chrétienne à travers la publicité. C’est aussi un complément aux émissions, qui, elles, sont une présentation de la foi chrétienne à partir des publicités.

Avec ce livre on a un bon mélange des deux, à mon avis. C’est un livre qui peut intéresser à la foi les croyants, les pratiquants, les gens qui ont la foi, et les personnes curieuses de la foi chrétienne ou de publicité. Par cette approche, ces dernières peuvent apprendre beaucoup de choses sur la foi qui anime les chrétiens.

À l’instar de Frankenstein, votre « créature » vous a un peu échappée.

G. M. : Oui, même si je la maîtrise encore (rires), c’est à des années- lumière de ce que nous imaginions avec Damien et Karin, quand on a lancé cette expositin à l’été 2013 à Périgueux.

C’est devenu aujourd’hui un concept intéressant, et d’ailleurs France-Info en septembre a parlé de l’exposition à Nice en parlant d’une expo déjà « Culte ». J’ai beaucoup aimé l’expression…

Mais c’est effectivement quelque chose qui nous a complètement dépassé, et qui, aujourd’hui, avec ces trois volants (l’exposition, l’émission et le livre), est, j’ose le dire, une démarche missionnaire. Nous sortons de nos schémas préconçus et de nos habitudes pour, par un biais inédit et insolite, rejoindre des personnes qui sont très éloignées de nos cercles.

Il y a eu des réactions fortement hostiles, notamment à Paris, comment les avez-vous gérées ?

G. M. : Assez légèrement à vrai dire, parce qu’on parle d’une pétition qui a recueilli, je crois, 24 signatures, venant de la part de personnes n’ayant pas vu l’exposition puisque c’était avant sa présentation à Paris.

À cela s’ajoutent deux ou trois courriers anonymes dont les auteurs  n’avaient aucune idée de la démarche dans laquelle j’inscris cette exposition…

Il y a une phrase qui a retenu mon attention, j’en ai fait la conclusion de mon instruction, c’est une citation de Bernice Fitz-Gibbon, une pionnière de la publicité aux États-Unis disant ceci : « Une bonne publicité devrait ressembler à un bon sermon, elle ne doit pas seulement soulager les affligés, mais elle doit également affliger les satisfaits ».

Et je crois que s’il y en a qui ont été affligés, par l’exposition, l’émission et sans doute maintenant par le livre, c’est que ce sont des « satisfaits », et dans ce cas le projet « Dieu dans la Pub » a parfaitement rempli sa mission.

Ce livre est une conclusion ?

G. M. : Oui, car à un moment donné il faut savoir s’arrêter et passer à autre chose. Pour autant, l’exposition ne va pas s’arrêter tout de suite car elle est programmée au moins jusqu’à fin 2017. Les émissions se poursuivent jusqu’au 15 juin, mais après, je ne sais pas.

Je ne crois pas qu’il faille trop tirer sur la corde si on veut que cela garde du sens, et qu’il ait toujours un effet de surprise.

Pour moi ce succès est déjà insolite et inattendu, je prends tout ça comme de belles choses, ce qui m’intéresse aujourd’hui c’est de partager cet outil. Je commence à avoir des contacts avec des aumôneries de collège ou de lycée, intéressées par la démarche, pour des rencontres d’aumônerie ou pour construire une catéchèse.

On a déjà écrit un livret pour aider les scolaires à visiter l’exposition et ainsi entrer un peu plus dans une démarche d’ouverture de la Bible, de découverte des références.

Propos recueillis par C. Foucher
Article publié dans Eglise en Périgord N°23 – 2016

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